LE GRAND SAUT

La décision est prise, le bateau s’installe en mode navigation. Vérification du fonctionnement des instruments, ais, logiciel de nav., réception météo iridium, fin approvisionnent, plein d’eau, plein de gaz, calage des objets contondants, vaccin fièvre jaune pour Jérôme…attente de la bonne fenêtre météo…au revoir (peut être) aux amis de ponton.

Tout cela prend la semaine, en fin de compte je serai resté la totalité d’un mois aux Canaries.

Donc…le 6 novembre on lâche les amarres pour 6 à 8 jours de navigation. La fenêtre météo semble « raisonnable ». Il ne faut pas partir plus tard, le fameux anticyclone des Açores vient de lâcher et la forte houle venue d’une dépression plus au nord déferlera sur les Canaries et au-delà, dans 2 jours. D’ici là on sera hors de portée.

Un petit arrêt Gasoil a Puerto Calero. Descente des Canaries, je sous toile en prévision des éventuels effets venturis entre les iles. (Renforcement du vent).

Première nuit. Les iles des Canaries ne sont pas encore totalement doublées mais le déclin du jour ouvre la porte du voyage, a l’aurore nous seront déjà loin.

Les  deux premiers jours de navigation se passent sans soucis majeurs. Le vent arrière est plutôt faible, les voiles en ciseaux, un peu de houle. Max Wolfer  (instit, navigateur, bénévole, ¼ président VSF) m’a dit un jour : « de toute façon, même une baignoire y  arrive ». Il est vrai que dans ce sens  les vents sont portants en permanence, c’est le retour que la baignoire aura du mal à faire. Je ‘interroge : « mon bateau peut il être considéré comme  une baignoire ? »

Cool vous dites : ben non, ça va se gâter, s’agiter et se gîter.

Dans la nuit le vent se renforce, (5 à 6) et la mer se forme. Ce n’est pas la mer du vent, la houle est courte et le sommet des vagues déferle dans les rafales.

Le bateau fait bouchon, monte descend, remonte et redescend, une baignoire dans un ascenseur. Inconfortable, mais on prend l’habitude. Je n’ai plus envie de faire la cuisine c’est Jérôme qui s’y colle.

Le 9 novembre en prévision d’une météo un peu plus musclée, on ne garde  que le génois, plus  facile à réduire que la grand voile, dès que le vent se renforce. Le bateau fait ses 5/6 nœuds, on garde un œil sur le pilote automatique qui n’assure pas toujours tant les périodes de houle sont courtes.

Fait remarquable, plus on descend vers le sud et plus on a froid. Ciré et polaire   …temps breton  (????). Les nuits sont vraiment fraiches, il faut attendre que le soleil remonte bien pour en sentir les bienfaits. De temps en temps j’ai le sentiment de sentir des effluves de terre chaude, je sais que nous longeons le désert marocain et mauritanien bien loin des côtes pourtant.

Glops ! : Dans la nuit du 10 novembre le pilote en fin de course ne peut plus redresser. Jérôme, qui était de quart, prend la main et barre, la mer est forte et déferle. On estime au moins 35 à 40 nœuds de vent  (prévisions 25). Le souci est cette houle trop courte pour le débattement du pilote. Une vague s’impose dans le copick par l’arrière, la survie se détache en partie…je reboute comme je peux, on finalisera plus tard. On s’inquiète de savoir si l’on devra barrer en permanence, 3 heures plus tard, ça se « calme » (tout est relatif), on peut remettre le pilote Ouffff ! enfin !

Deux jours difficiles. On n’a pas le choix que de subir et d’avancer, rester au portant, il faut descendre davantage au sud pour une mer plus confortable.

Pourquoi je m’impose ça ? ……Réponse à l’arrivée.

A partir du 13 novembre pétole. Peu  de vent, on revit.

 

Les vagues qui ont tapé sur le travers du bateau ont déposé des dizaines de poissons volants et de petits Calmars. Incroyable la vie que contient une vague. On s’en rend compte la nuit par la fluorescence. Le sillage du bateau, plus particulièrement, est parcouru d’éclats lumineux. De toutes dimensions, calmars, méduses, plancton luminescents  filent sous l’eau et éclairent, flashent la surface.

 

Le 13 novembre : Pétole, plus de vent.  On profite de cette accalmie pour ne « plus trop en faire » le bateau glisse sur l’eau à son rythme, on n’est pas pressé.

Pêché : un thon. Les premières darnes,  bien fraiches,  poêlées comme un steak, la suite  un peu plus cuit, les derniers repas à la vapeur.

Le bateau à considérablement ralentit cela m’arrange et évite une arrivée de nuit.

Le samedi 15 novembre Dakar est en vue. Veille permanente car les pirogues qui pêchent sont nombreuses, il faut faire attention aux filets, suivre attentivement le balisage. Les obstacles se multiplient en approche, l’arrivée de Dakar n’est pas conseillée de nuit.

L’ile de Gore est doublée, le mouillage est pris dans la baie de Hann devant le CVD (Centre de Voile de Dakar). On retrouve Yobalema et son équipage paré à partir pour le Sine Saloum.

L’Afrique enfin est devant nous, à quelques centaines de mètres. Groggy par le voyage, impressionné par la côte toute proche,  nous mettrons 1 journée et demie avant de descendre à terre. Du bateau nous quittons l’Europe.

Accueil au CVD, premiers pas au Sénégal.

 

Sur un des  murs du centre une citation. Ben ! Elle est là ma réponse.

 

La suite : Départ pour le Siné Saloum.

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